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Notre conférence « Egalité hommes-femmes »

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Au début de l’année 2014, un sujet sensible agitait quelque peu la population. Au moment de l’intégration de « l’ABCD de l’égalité », on a pu entendre tout et n’importe quoi sur les réseaux sociaux. Les parents s’inquiètent de ce qu’on enseigne à l’école et c’est normal (on serait plus inquiet si les parents cessaient de s’intéresser au sort de leurs enfants). Les parents d’élèves (ainsi que les élèves) ont pu exprimer des craintes et l’équipe enseignante a jugé (comme pour la charte de la laïcité) que ce serait une bonne idée d’intervenir auprès du public (avec l’aimable participation de la mairie et de l’association des DDEN) pour compléter et prolonger l’intervention de la préfecture.

 

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Tout d’abord nous avons rappelé une évidence: l’égalité hommes-femmes est présente dans les programmes depuis des décennies. L’Education Nationale n’a pas attendu 2014 pour émettre cette idée. Nous traitons à égalité les élèves filles et les élèves garçons.

La conférence a débuté par l’intervention du collège de mathématiques, Monsieur Slimani, qui a expliqué les différentes conceptions de l’égalité (en montrant par exemple que l’égalité ne se confond pas avec l’identité). Il a également présenté, à l’aide d’un powerpoint fort travaillé, différentes statistiques précises pour analyser plusieurs aspects du phénomène. Puis Monsieur Chapuis, professeur de lettres et spécialiste du patrimoine local, a parcouru l’histoire de l’humanité depuis l’Antiquité jusqu’à la Révolution française pour retracer l’histoire des inégalités. Ensuite, j’ai poursuivi, pour la partie philosophie, sur un texte qui, dès 1940, s’interrogeait sur l’origine des inégalités. Car la question n’est pas seulement de constater ces dernières, il s’agit aussi de se demander si elles sont naturelles ou culturelles car, dans la deuxième option, cela signifie qu’elles dépendent de l’éducation et qu’on peut les modifier.

Enfin, le public était venu avec de nombreuses questions pertinentes. Certes les parents sont préoccupés par ces questions, mais de nombreuses professions le sont également (politique, édition, commerce).

Quand on parle d' »égalité à l’école », il ne s’agit pas de véhiculer l’idéologie de tel ou tel lobby: on travaille d’abord à donner un maximum de chances à tous les élèves. Il ne faut pas que les stéréotypes sexistes puissent les freiner dans leur travail ou dans leur orientation professionnelle (et je vous renvoie à mes précédents articles sur ces points précis).

Pour conclure, le très sérieux journal Le Monde avait publié une série d’articles pour déconstruire les étranges rumeurs qui ont pu circuler sur la toile. Je les ajoute ici à titre de complément:

http://www.lemonde.fr/politique/article/2014/01/28/cinq-intox-sur-la-theorie-du-genre_4355738_823448.html

http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/01/31/education-sexuelle-et-genre-5-autres-intox-decryptees_4358039_3224.html

http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/04/12/theorie-du-genre-enquete-sur-la-folle-rumeur-de-joue-les-tours_4400256_3224.html?xtmc=abcd_egalite&xtcr=35

http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/02/13/l-ecole-est-engagee-dans-la-lutte-contre-les-inegalites-entre-les-sexes-depuis-trente-ans_4365621_3224.html?xtmc=abcd_egalite&xtcr=46

 

 

 

Les serious game

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Qu’est-ce qu’un serious game ?

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Pourquoi les hommes sont-ils violents ?

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L’actualité est régulièrement entachée par des histoires de crimes conjugaux. Je suis sidéré par les réactions. Systématiquement les gens s’émeuvent, déplorent le drame et se figent dans l’incompréhension. « On comprend pas ». J’entends régulièrement cette phrase lors des interviews et les reportages ont tendance à présenter ces crimes comme des tragédies imprévisibles. Untel serait devenu fou. C’était inattendu. Vraiment ? Quand les assistantes sociales réalisent des signalements répétés pour des affaires de violences conjugales, il est difficile de croire que l’homicide soit un événement imprévu.

On nage complètement dans une conception de la causalité telle que Nietzsche la dénonçait : on croit qu’une action résulte des choix spontanés d’une personne et que cette dernière est entièrement responsable. En réalité, nous disposons de nombreux experts en sciences humaines qui travaillent sur ces problèmes et qui proposent des solutions. Mais les sociétés préfèrent se laver les mains. On tente par exemple de prétendre que les humains sont naturellement violents pour dissimuler le rôle de l’éducation dans la formation du comportement.

Je reproduis ci-dessous une partie de mon mémoire de master consacré à cette difficile question. Il s’avère que les chiffres et les phénomènes sont (malheureusement) toujours d’actualité.

 

Le Problème de la violence des jeunes hommes

 

a)      La violence des jeunes dans les pays anglo-saxons

Les pays anglo-saxons sont confrontés à ce qu’ils nomment la violence des « young white males ». J’ouvre cette partie avec l’incipit d’un article de l’américain Paul Kivel, éducateur pour la prévention de la violence chez les jeunes, « Young White Men : Scared, Entitled, and Cynical _ A Deadly Combination », publié dans le In Motion magazine du 9 décembre 1999.

 

WE HAVE A VERY SERIOUS PROBLEM in this country. No, it’s not welfare mothers, it’s not recent immigrants, it’s not African- American or Latino men, it’s not Arab terrorists—it is young white men.

Nearly 70% of the devastating violence we experience in our communities is committed by white men and nearly 50% of that is committed by young white men between the ages of fifteen and thirty[1]. What kind of violence am I referring to? Take your pick.

Domestic violence, rape, acquaintance rape, incest, male on male fights, serial killings, racist hate crimes, gay-bashing, arson, campus riots such as recently occurred at Michigan State University, and barroom brawls. Estimates are that 95% of all violence in our society is committed by males, and although women, men of color, and white men of all ages certainly can be violent, the overwhelming majority of acts of violence can be traced to young white men.

 

Nous avons un très grave problème dans ce pays. Non, ce n’est pas le bien-être des mères, ce ne sont pas les récents immigrants, ce ne sont pas les hommes afro-américains ou hispaniques, ce ne sont pas les terroristes arabes. Ce sont les jeunes hommes blancs.
Près de 70% de la violence dévastatrice que nous vivons dans nos communautés est commise par des hommes blancs et la tranche des 15-30 ans est responsable de 50% de ces actes violents.

Mais de quelle violence parlons-nous ?
La violence domestique, le viol, l’inceste, les combats entre hommes, les meurtres en série, les crimes haineux à caractère raciste et/ou homophobe, les incendies criminels, les émeutes de campus (comme récemment celle qui a eu lieu à la Michigan State University) et les bagarres. On estime que 95% de toutes les violences dans notre société sont commises par des hommes. Bien que les femmes, les hommes de couleur, et les hommes blancs de tous âges puissent certainement être violents, l’écrasante majorité des actes de violence peuvent être attribués à des jeunes hommes blancs.

 

Ce problème de la violence des « jeunes mâles blancs » (pour reprendre la terminologie anglo-saxonne) est-il récent ? Non, Elisabeth Badinter écrivait déjà en 1992 :

« Il est certain que là où la mystique masculine continue de dominer, comme c’est le cas aux Etats-Unis, la violence des hommes est un danger perpétuel. Au début des années 1970, la Commission nationale américaine des causes et de la prévention de la violence notait : « Ce pays connaît un taux beaucoup plus élevé d’homicides, de viols, et de vols que toutes les autres nations modernes, stables et démocratiques. » La Commission ajoutait que la plupart de ces violences criminelles étaient commises par des hommes entre quinze et vingt-quatre ans. « Prouver sa virilité, expliquait le rapport, exige la manifestation fréquente de sa dureté, l’exploitation des femmes et des réponses rapides et agressives. »

Depuis vingt ans, la situation a nettement empiré et l’écart s’est encore creusé entre l’Amérique et l’Europe. On a déjà évoqué l’augmentation de la violence masculine contre les homosexuels. Mais rien n’est comparable à celle dont les femmes sont les victimes, battues ou violées. Le viol est le crime qui augmente le plus aux Etats-Unis. Le FBI estime que si cette tendance se poursuit, une femme sur quatre sera violée une fois dans sa vie. Si l’on ajoute que le nombre de femmes battues par leur mari chaque année est estimé à 1.8 million, on aura une idée de la violence qui les entoure et de la peur des hommes qu’elles ressentent légitimement[2]. »

En France, nous nous refusons à pratiquer un classement racial[3] comme aux Etats-Unis pour la bonne raison qu’il est impossible de classer qui est « blanc » et qui ne l’est pas. Il s’agit de classifications arbitraires, les « races » n’ayant jamais été prouvées scientifiquement. Pour étudier le phénomène de la violence des « young white males », nous parlerons plutôt de la violence des jeunes hommes.

Elisabeth Badinter pointe un écart entre l’Amérique et l’Europe, mais qu’en est-il en France ?

b)      Vérification par les statistiques

Observons à travers les phénomènes de la criminalité, du suicide, du crime passionnel et de la violence scolaire s’il y a une sur-représentation des hommes et des jeunes.

  • En prenant pour source les statistiques officielles de la criminalité publiées[4] par ministère de l’intérieur, je vais étudier la question de la violence en France. Les hommes et les jeunes sont-ils plus impliqués ?

J’ai dressé un tableau à partir des statistiques officielles en relevant notamment les infractions relevant des crimes violents (homicides) et la répartition des personnes mises en cause selon le critère du genre et de l’âge. Il s’agit de vérifier notre hypothèse. Qui sont les criminels ? S’agit-il d’hommes ? Sont-ils mineurs ou majeurs ?

Oui. Les hommes sont sur-représentés statistiquement. En revanche, d’après les chiffres les mineurs ne sont pas les plus impliqués.

Globalement, dans la majorité des crimes, les hommes adultes sont les plus nombreux, abstraction faite de quelques exceptions. Dans le cas des vols de véhicules motorisés à deux roues les mineurs sont plus nombreux que les majeurs. Dans le cas des homicides contre des enfants de moins de 15 ans, les femmes sont légèrement plus nombreuses que les hommes.

 

  • Pour étudier le problème du suicide, de la violence retournée contre soi, j’utilise comme source le Rapport mondial sur la violence et la santé[5] de l’OMS publié le 3 octobre 2002.

 

Pays

Année

Nombre de suicides

Suicides pour 100 000 habitants

Ratio hommes/femmes

France

1998

10 534

20

3,2

Royaume-Uni

1999

4448

9,2

3,8

Etas-Unis

1998

30 575

13,9

4,4

Japon

1997

23 502

19,5

2,4

Pologne

1995

5499

17,9

5,5

Fédération de Russie

1998

51 770

43,1

6,2

Lituanie

1999

1552

51,6

6,2

Chili

1994

801

8,1

8,1

 

On constate que la France a un taux élevé de suicides (semblable à celui du Japon). J’avais posé l’hypothèse que les peuples anglo-saxons étaient violents mais leur taux de suicides est plus bas.

Il ressort nettement des chiffres de l’OMS que les hommes se suicident plus que les femmes, dans tous les pays. En France, les hommes se suicident trois fois plus que les femmes. Ce ratio peut augmenter sensiblement dans d’autres pays.

On peut incriminer les conditions socio-économiques quand on tente d’expliquer le suicide. Mais comment expliquer, malgré les interdits religieux, le nombre important de suicides dans les pays riches ou en voie de développement? Comment expliquer que les hommes se suicident plus que les femmes ? Faut-il l’expliquer par une plus grande violence des hommes, contre eux-mêmes ?

  • Qu’en est-il du crime passionnel (quand un homme tue sa femme ou inversement) en France ? D’après le rapport Coutanceau[6], publié en 2006, une femme meurt tous les 4 jours environ, sous les coups de son conjoint. Inversement, un homme meurt tous les 16 jours environ sous les coups de sa conjointe. Il faut en conclure que les hommes sont plus violents que les femmes.

Dans le cas des crimes passionnels « Plus de la moitié  des hommes (55%) tuent une femme qui les quitte ou menace de le faire, et une proportion presque  équivalente (53%), une femme qui les trompe, ou qu’ils soupçonnent de le faire[7]. »

Les hommes tueraient plutôt pour « garder les femmes, tandis que celles-ci seraient  souvent amenées à tuer pour se  débarrasser de leur conjoint[8] ».

« Le meurtre d’une femme par son partenaire est vu comme un fémicide dans le mesure où la dynamique de pouvoir y est toujours prédominante : les hommes violent, tuent, non pas parce qu’ils perdent le contrôle d’eux-mêmes, mais parce qu’ils cherchent à exercer un contrôle sur leur partenaire (Radford et Russel 1992).[9] »

D’après le rapport Coutanceau 31% des crimes conjugaux seraient liés à la séparation. Que peut-on en conclure ? Dans ces différents cas, il n’est pas question de savoir s’adapter aux circonstances. Nous avons des individus qui réagissent par la violence. Incapables de garder le contrôle sur une situation, sur une personne, ils recourent à la force brute, à la violence.

 

  • Pour s’interroger sur le problème de la violence des jeunes, on peut également étudier la sociologie scolaire et le problème de la violence scolaire en France. Sylvie Airal[10] remarque que la grande majorité des élèves punis au collège sont des garçons (plus de 80 %). Ce taux augmente encore pour les problèmes de violence. Faut-il en conclure que les jeunes garçons sont violents ? Sylvie Airal arrive à la conclusion que les garçons cherchent systématiquement la transgression et la sanction (devenues l’équivalent d’une épreuve, d’un rite de passage) pour affirmer leur identité sexuelle. Toutefois cette étude récente montre encore une fois que les garçons sont plus violents que les filles.

 

D’après le rapport mondial sur la violence et la santé[11] de l’OMS publié le 3 octobre 2002 :

« Il est très courant, dans bien des régions du monde, que les enfants d’âge scolaire se battent. Un tiers environ des élèves déclarent s’être battus, et les garçons sont deux à trois fois plus nombreux que les filles dans ce cas. Il est fréquent aussi que l’on s’intimide entre enfants d’âge scolaire. Il ressort d’une étude des comportements liés à la santé visant les enfants d’âge scolaire de 27 pays que, dans la plupart des pays, la majorité des enfants de 13 ans cherchent à intimider autrui pendant une partie du temps au moins. Hormis le fait qu’il s’agit de formes d’agression, l’intimidation et les bagarres peuvent également déboucher sur des formes de violence plus graves ».

Les chiffres de l’OMS semblent confirmer une prédisposition des mâles à la violence.

c)      Les hommes sont-ils naturellement violents ?

Les hommes sont-ils violents par nature ? Existe-t-il une violence innée chez les mâles ? Bien sûr que non. L’observation de divers peuples nous amène à penser que l’éducation est primordiale dans le développement de caractères violents. Si les jeunes hommes des sociétés occidentales du XXe siècle sont violents, ce n’est pas le cas dans certains peuples comme les Semai[12] :

« Les Semai pensent que l’agressivité est la pire des calamités et la frustration de l’autre, le mal absolu. Résultat, ils ne se montrent ni jaloux, ni autoritaires, ni méprisants. Ils cultivent des qualités non compétitives, sont plutôt passifs et timides et s’effacent volontiers devant les autres, hommes ou femmes. Peu préoccupés par la différence des sexes, ils n’exercent aucune pression sur les enfants mâles pour qu’ils se distinguent des filles et deviennent de petits durs[13] ».

C’est la société qui conditionne les individus. La question se pose donc : qu’est-ce qui provoque ce mal-être et cette violence dans nos sociétés occidentales ?

 

Pour aller plus loin, voici un lien pour suivre les résultats du colloque « Genre et violence dans les institutions scolaires et éducatives » auquel j’ai failli participer en octobre: http://mixite-violence.sciencesconf.org/


 

[1] Department of Justice statistics for 2000 which can be found at http://www.justice.gov

[2] Badinter E., XY De l’identité masculine, 1992, Le livre de poche, p 206-207

[3] Courrier de l’UNESCO, édition de juillet-août 1950 , « Les Savants du monde entier dénoncent un mythe absurde… le racisme »

[5] ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTE, Rapport mondial sur la violence et la santé, Genève, 2002 : http://www.who.int/violence_injury_prevention/violence/world_report/fr/index.html

[7] Annik Houel et Patricia Mercader, Psychosociologie du crime passionnel, 2008, PUF, p 65

[8] Ibid., p 66

[9] Ibid., p 111-112

[10] Sylvie Airal. La fabrique des garçons, Sanctions et genre au collège, PUF, 2011.

[12] Lire D. Gilmore, Manhood in the Making. Cultural Concepts of Masculinity, Yale University Press, 1990 et Robert K. Dentan The Semai: A Non Violent People of Malaysia, N.Y. Holt, Rinehart and Wurston, 1979

[13] Badinter E, op. cit., p 49, note 5

Le syndrome « Kitty Genovese »

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Je déconseille la lecture de cet article aux jeunes lecteurs.

Qu’est-ce que le syndrome « Kitty Genovese » ?

C’est une manière d’expliquer l’inaction des individus lorqu’ils sont en groupe. L’histoire de Kitty Genovese est assez triste. L’histoire est arrivée dans les années 60 à New York.

Kitty Genovese, 29 ans, rentrait chez elle après le travail. Elle s’est faîte agresser en bas de son immeuble. Kittu a crié. Plusieurs dizaines de témoins ont entendu. Certains voisins ont ouvert la fenêtre mais personne n’est intervenu. L’agresseur a reculé mais il est revenu quelques minutes après. Personne n’a appelé la police. L’agresseur a reculé puis est revenu plusieurs fois. La crime a duré environ une heure. Une femme a été assassinée devant son immeuble et personne n’a réagi.

Pourquoi ?

L’Amérique a été choquée par ce crime et par tous ses témoins inactifs. L’immeuble était-il peuplé de sadiques pervers ? Non. Les habitants étaient des gens normaux. Alors pourquoi avoir attendu aussi longtemps pour prévenir la police ?

Je recommande la lecture du livre de Bibb Latané et John Darley: The Unresponsive Bystander: Why Doesn’t he help ? ou le récent livre Un si fragile vernis d’humanité de Michel Terestchenko.

Durant les dernières décennies les chercheurs en psychologie sociale ont beaucoup étudié ce phénomène. Pourquoi les gens sont-ils inhibés en groupe ? Pourquoi prennent-ils moins d’initiative ?

Une explication possible: on croit que les autres vont agir à notre place: « Mon voisin est probablement en train d’appeler la police ».

Autre explication: on attend de voir ce que les autres vont faire pour agir (par conséquent personne n’agit).

Une autre explication possible (de votre professeur de philosophie): les gens n’ont pas fait suffisamment de philosophie. Ils ont l’habitude de laisser les autres penser à leur place et ne savent pas penser par eux-mêmes.

PS: Récemment un très bon film francophone est sorti sur le sujet: 38 témoins.

 

Ecrire pour apprendre à lire

Ecrire pour apprendre à lire

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Ecrire pour apprendre à lire

Pendant plusieurs siècles, les élèves ont appris à écrire avant d’écrire. On ne voyait pas l’intérêt de faire écrire les enfants avant qu’ils sachent le faire correctement. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Aujourd’hui nous faisons écrire les élèves, dès le CP, dès la maternelle. Cette pratique semble très étrange pour de nombreuses personnes aussi vais-je prendre le temps de me pencher dessus.
Nos chercheurs pensent que le fait d’écrire (l’activité d’écriture) va aider les enfants à apprendre à lire. Etrange, n’est-ce pas ? Lire et écrire semblent être deux activités distinctes. En quoi le fait d’écrire (de mal écrire) peut-il aider un élève à lire correctement ? Dans un premier temps, nous verrons pourquoi les pédagogues privilégient des activités d’écriture pour l’apprentissage du lire-écrire. Dans une deuxième partie nous verrons comment, concrètement, dans une classe nous pouvons mener ce genre d’activités.

1) Pourquoi écrire pour apprendre à lire?

Deux raisons essentielles. La première est que l’écriture permet de construire plus activement la connaissance du code. Que signifie cette théorie en français ? Quel est ce code ? Est-ce le « Da vinci code » ?
Nous parlons du code « grapho-phonologique ». Ce code fait correspondre à un son, un écrit. Il est nécessaire pour lire de faire correspondre à des signes écrits, des sons. Quand vous lisez le mot « le », vous allez prononcer à voix haute le son « le » qui lui correspond. Maintenant dites-vous que pour écrire c’est la même chose. A l’envers. Si vous voulez écrire « bonjour ». Il faut chercher par quels signes écrits vous allez représenter les sons « bon » et « jour ». De cette manière vous étudiez « activement » le code grapho-phonologique.
La seconde raison est que l’écriture permet une entrée efficace dans la culture de l’écrit. Que signifie « la culture de l’écrit » ? Comme il existait une « culture de l’oral » dans les civilisations primitives, nos civilisations ont développé une culture de l’écrit. Vous savez à quoi correspond chaque support. Si vous voyez un journal, vous savez qu’il contient des informations. Si vous voyez un roman vous savez qu’il contient une histoire. Si vous allez dans un pays européen dont vous ne parlez pas la langue et que vous voyez une plaque de fer portant des inscriptions dans chaque rue, vous devinez qu’il s’agit du nom de la rue. Vous êtes capable de deviner des choses, avant même de les lire, parce que vous savez à quoi servent ces inscriptions.
La culture de l’écrit c’est aussi la communication différée. A l’oral, vous parlez avec votre interlocuteur quand il est présent. A l’écrit, vous écrivez un texte qui ne sera pas lu tout de suite. Il faut s’efforcer d’être clair et compréhensible car vous ne serez pas là pour expliquer les points d’ombre à votre interlocuteur.
En tant que scripteur (la personne qui écrit) vous découvrez une culture de l’écrit que vous utiliserez en tant que lecteur. Cela vous permettra de lire plus efficacement.
Maintenant, certains d’entre vous vont peut-être objecter que « c’est de la théorie ». Est-ce que dans la pratique cette démarche fonctionne ?

2) Quelles situations d’écriture peut-on proposer en classe à des élèves qui ne savent pas encore écrire ?

a) La dictée à l’adulte

Les élèves peuvent dicter un texte à l’adulte (en l’occurrence leur professeur).
Prenons un exemple concret. La classe est allée visiter une ferme. Les élèves veulent écrire un résumé pour leurs parents. Ils ne savent pas écrire. Le professeur se propose d’écrire le résumé sur une feuille. Les élèves vont tenter de dicter un texte et c’est là que ça devient intéressant.
Pour dicter un texte, on est obligé de construire des phrases correctes, donc on est obligé de réfléchir sur la manière dont on construit une phrase.
Si un élève commence une tirade « onestallévoirlesvaches » il va rapidement constater qu’à l’écrit on découpe les mots « on est allé voir les vaches ». Caractéristique de l’écrit que l’enfant ne découvrirait jamais s’il restait dans sa culture de l’oral.

b) Ecriture tâtonnée

L’écriture tâtonnée consiste à faire écrire quelque chose aux enfants. « Ecrivez une affiche » par exemple. Les enfants ne savent pas écrire mais ils voient des affiches autour d’eux. Ils vont tenter d’écrire quelque chose.
Le résultat sera faux évidemment. Mais ce n’est pas ce qui nous intéresse. Quand un enfant tente d’écrire, on voit immédiatement ce qu’il a compris et ce qu’il n’a pas compris. Est-ce qu’il utilise des lettres ? Est-ce qu’il découpe les mots ? Est-ce qu’il sait déjà écrire un mot connu (son prénom par exemple) ?
L’écriture tâtonnée permet à l’élève de se confronter à l’écrit et permet à son enseignant de voir où se situe l’élève.

En conclusion, les chercheurs s’accordent pour préconiser un enseignement solidaire et interactif de la lecture et de l’écriture.

L’erreur

L’erreur

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Est-il bien vu de faire des erreurs ?

Le tableau de Jacques Louis David: La mort de Socrate

A priori non. Quand on dit « j’ai commis une erreur », en général, on regrette ce qu’on a fait. On s’est trompé. On aurait préféré faire autre chose.
Une erreur c’est faire autre chose que la chose attendue. C’est l’écart entre notre réponse « réelle » et la réponse « parfaite ».
Errare humanum est. « L’erreur est humaine » a-t-on coutume de dire car l’erreur est partout. Et plus particulièrement, elle est présente dans les apprentissages. Quand on cherche à apprendre, on fait inévitablement des erreurs.

Mais quel est le statut de l’erreur dans une démarche d’apprentissage ?

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Les nombres: invention ou réalité ?

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Les mathématiques sont-elles des créations de l’esprit humain ? Ou bien, est-ce le langage caché de la nature ? Retraçons ensemble l’histoire des mathématiques et notamment les différentes classes de nombre.

Les Nombres entiers

On note N l’ensemble des entiers naturels.
« N= {0,1,2,3,4,5,6,…} »

Dans l’histoire de l’humanité, ce sont les premiers nombres qui apparaissent. Pourquoi ? Parce que ce sont les plus simples. Les hommes préhistoriques ont rapidement compris qu’il pouvait y avoir 1 mammouth, ou 2 mammouths ou 3 mammouths. A l’époque, ils voyaient rarement passer un huitième de mammouth ou (-4) mammouths ou √(mammouth). Les entiers naturels servent à dénombrer les éléments d’un ensemble fini.

Un vieux système (repris en maternelle de nos jours) consiste à prendre un paquet de cailloux. Si vous avez besoin de compter les bêtes de votre troupeau par exemple. Vous mettez un caillou pour chaque bête dans votre sac. Un caillou pour une bête. Ainsi vous savez précisément combien vous avez de bêtes. De retour à la grange, vous jetez un caillou pour chaque bête récupérée et vous voyez si ça correspond.

Après les cailloux on s’est dit qu’on pourrait tracer un trait pour indiquer chaque unité. Nous avons créé les premiers systèmes de numération. Puis chaque civilisation a créé son système avec ses codes. Quel est le code européen ?

Nous avons repris les chiffres arabes : 0,1,2,3,4,5,6,7,8,9.
Nous utilisons un système décimal de position. Décimal parce que nous utilisons 10 chiffres différents (voir ci-dessus). « De position » parce que la position d’un chiffre dans un nombre fait varier sa valeur.
Ex : 2 en tant que chiffre des unités dans « 572 » vaut 2.
2 en tant que chiffre des centaines dans « 283 » vaut 200.

Les nombres relatifs

On appelle Z l’ensemble des nombres entiers relatifs. Cet ensemble est composé de tous les nombres de N et de leurs opposés.
Z = {…,-4,-3,-2,-1,0,1,2,3,4,…}

Certes, nous n’avons jamais croisé (-3) mammouths mais nous utilisons les nombres relatifs pour différents usages. Pour mesurer la température, il n’est pas rare de dire qu’il fait « moins cinq ». Idem pour des dates importantes : nous sommes à J moins cinq des jeux olympiques.

Pourquoi les fractions ?

Imaginez que vous soyez un paysan dans l’Egypte Antique. Vous essayez de mesurer les limites de votre lopin de terre. Vous prenez une corde et vous commencez à la mettre par terre Vous recommencez et au bout d’un moment vous constater que la distance que vous vouliez mesurer correspond à vingt fois votre bout de corde.

Maintenant imaginons que la distance à mesurer ne correspond pas exactement. Vous savez que la distance fait plus de dix-neuf fois votre corde mais moins que vingt. Que faut-il inscrire sur le registre ? Essayez de replier votre corde. Vous repliez en deux parties égales et vous mesurez le bout restant. Cela fonctionne. Vous savez que la distance à mesurer correspond à dix-neuf fois et demi votre corde.
Dès l’Antiquité, nous avons pu utiliser les fractions. Repliez votre corde en quatre morceaux égaux et vous obtenez un quart de corde.

Les nombres décimaux

On appelle D l’ensemble des nombres décimaux.
Une fraction décimale est une fraction dont le dénominateur est une puissance positive (ou nulle) de 10.
Exemples :
8/100, 458/1000 et 2 sont des fractions décimales.
100=10² donc cela fonctionne. 1000=10³. Enfin 2=2/1 et 1=〖10〗^0.
Un nombre est décimal s’il peut s’écrire sous la forme d’une fraction décimale.

Les nombres rationnels

L’ensemble des nombres rationnels est noté Q.
Un nombre rationnel est un nombre qui peut s’écrire sous la forme d’une fraction a/b.
2 appartient à Q puisque 2= 2/1.
(-3) appartient à Q puisque (-3) = (-3)/1.
4,5 appartient à Q puisque 4,5= 45/10.
5/7 appartient à Q puisque c’est une fraction.

Les nombres réels

Pour arriver à constituer la classe des nombres réels il faudra ajouter les nombres rationnels et les irrationnels. « Nombres irrationnels ». Voici un titre bien étrange. Les nombres ne sont-ils pas des productions de l’esprit « rationnel » ?
Il existe des nombres qui ne sont pas le quotient de deux nombres entiers, ils ne peuvent s’écrire sous la forme d’une fraction.

Exemple : le nombre √2
Historiquement ce nombre a posé problème. Revenez au temps de l’Antiquité. Vous tracez un côté qui mesure 1m de côté. Combien mesure la diagonale du carré ? Vous connaissez déjà la formule : la diagonale d’un carré mesure la longueur du côté multipliée par √2. Mais ce résultat est dérangeant. Ce nombre semble infini. Avez-vous déjà réussi à écrire ce nombre, avec toutes les décimales ?
Ce nombre semble « irrationnel » pourtant il existe.
Idem pour π! Pouvez-vous écrire ce nombre intégralement ? Non. Pourtant nous savons qu’il existe puisque nous l’utilisons pour calculer la circonférence et l’aire d’un disque.

Les nombres complexes

Pour finir il existe une dernière classe qui englobe les précédentes : la classe des nombres complexes.
Tout le monde se souvient que 2²=4 et (-2)²=4. Jusque-là un nombre élevé au carré devenait forcément positif, mais nous inventons le nombre i tel que i²= -1.
Les nombres 3+2i ou 897+17i sont des nombres complexes.

L’enseignement du français : Grammaire normative VS Grammaire générative

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Classiquement la grammaire était considérée comme un ensemble de normes, de règles fixes. On parlait alors de grammaire normative. L’enseignement était simple. Les professeurs enseignaient les règles à appliquer et les élèves les appliquaient.

Ce système correspond parfaitement à la méthode béhavioriste : on répète des dizaines d’exercices jusqu’à ce que ça rentre. Toutefois, dans les faits, les élèves apprenaient les règles et les oubliaient.

 

Le linguiste Chomsky pose la théorie de la grammaire générative. D’après lui, les enfants naissent avec des prédispositions pour apprendre la langue. Je pose comme hypothèse que Chomsky a influencé la nouvelle pédagogie française (position plus ou moins contestée par les experts).

Aujourd’hui, en France, nous n’enseignons pas l’orthographe avec un système normatif. Nous donnons aux élèves des textes et c’est à eux de découvrir les règles de grammaire (et d’orthographe). S’ils découvrent la règle par eux-mêmes, ils la mémorisent bien plus efficacement que si on les avait « forcés ».

Dans les faits, on constate que, malgré la nouvelle pédagogie, de nombreux élèves ont encore des carences en orthographe.

 

Que faire si on est un adulte et qu’on est nul en orthographe ?

Solution n°1 : Lire ! Il faut lire. Quand on lit beaucoup on enregistre inconsciemment beaucoup de choses et on écrit mieux.

Solution n°2 : Prendre un livre de français pour CE1 ou un Bled et faire plein d’exercices. C’est pénible mais c’est la méthode la plus efficace.