Chronique 13: La cité du rêve de Julien Noël
Le site web Ymaginaires propose, en plus de son webzine et de nombreux articles sur l’actualité de la SFFF, des nouvelles inédites en ligne. Histoire de sortir des sentiers battus, j’ai pensé que j’allais piocher dans cette manne en reconnaissant le nom d’un jeune auteur qui a réalisé les 100 histoires de sorcières.
Résumé: dans un futur dystopique, un jeune garçon voyage en train et cherche à s’évader vers la cité des rêves.
Avis personnel : Nul besoin d’écrire un roman interminable pour bâtir un univers exotique. Julien y parvient en quelques pages. Les détails concernant la cité rendent le tout crédible. La nouvelle se lit vite grâce au style limpide de l’auteur.
Pour se faire un avis:
http://www.ymagineres.net/article-nouvelle-la-cite-du-reve-de-julien-noel-118998994.html
Jean-Philippe Jaworski, Janua Vera, Les moutons électriques, 2007, réédition Folio SF
Pour paraphraser un ami, « quand on lit Jaworski, on apprend du vocabulaire ». L’auteur français nous offre ici un univers médiéval renaissant riche en couleurs. Chaque nouvelle suit un personnage.
– Janua vera
Le roi-Dieu fait un cauchemar toutes les nuits. Mais qui peut-on consulter quand on est un dieu ?
Le concept rappelait autant le pharaon que l’Empereur-Dieu des Warhammer40 mais Jaworski offre une première nouvelle intéresse qui pose rapidement les bases de l’univers.
– Mauvaise donne
Buenvenuto est un tueur à gages. Pitié ! me suis-je dit. Histoire vue et revue, usée jusqu’à la corde. On va nous infliger un millième Bangkok dangerous ? Heureusement non. L’histoire suinte de machiavélisme et c’est bon.
Le tueur à gages est doublé et doit rapidement retrouver son commanditaire s’il espère survivre.
– Le service des dames
Un chevalier, un écuyer et un page souhaitent traverser une rivière mais la coutume locale l’interdit. Entre Kaamelott et le roman de Lancelot, les références aux romans arthuriens pullulent dans cette nouvelle mais en offrant toujours le même souci du détail historique et du mot juste.
Très bien !
– Une offrande très précieuse
L’armée de brigands tombe dans une embuscade et se fait décimer. Le soudard Cecht en réchappe et traîne un collègue mourrant dans la forêt. Au plus noir de la nuit, il rencontre une guérisseuse/sorcière capable de soigner son ami s’il lui rapporte une « offrande ».
Commentaire : Je ne souhaite pas dévoiler les détails de la nouvelle mais on est touché parce qu’elle est finalement la plus subtile de toutes. On devine les sentiments qui percent derrière ce personnage qu’on présente comme le plus épais et le moins humain de tous.
– Le conte de Suzelle
L’histoire d’une petite paysanne espiègle et gaffeuse qui se retrouve un jour confronté à un fantôme qui bouleverse sa vie.
– Jour de guigne
Jaworski enchaîne avec une histoire comique (démontrant qu’il maîtrise tous les styles). Alors qu’un mystérieux assassin hante les rues, on suit les mésaventures d’un assistant scribe victime d’une malédiction et d’une pléthore d’accidents cocasses.
Au début, je craignais la farce facile mais l’auteur maintient son lecteur en haleine avec moult rebondissements.
– Un amour dévorant
D’après moi, la meilleure nouvelle du recueil (et pourtant le reste est déjà excellent). Après nous avoir offert les histoires de politique, de combat, de magie et même d’humour, Jaworski conclut par une enquête. L’histoire traite de la malédiction d’un petit village. La nuit deux âmes en peine courent entre les arbres en appelant le nom d’une femme et malheur à qui croise leur chemin.
Je ne sais pas si Peter V Brett connaissait cette nouvelle quand il a rédigé son brillant Homme-rune mais on retrouve des échos avec ces villageois qui évitent soigneusement de sortir la nuit et qui fuient également nuages et brumes.
La nouvelle de Jaworski suit l’enquête d’un gyravogue, c’est-à-dire un prêtre du Désséché (le dieu de l’hiver), qui tente de retrouver l’origine des fantômes pour les exorciser.
Commentaire : J’ai adoré d’un bout à l’autre, jusqu’à la révélation de la dernière page.
– Le confident
Jaworski achève son recueil par une courte nouvelle sur un autre prêtre du Désséché. L’histoire est très sombre (notamment parce que le héros vit dans le noir) mais, finalement, le confident qui se confie est une idée intéressante.
Webzine, Univers Outremonde n°9
Outremonde est un webzine. Certains m’objecteront peut-être qu’un webzine est une œuvre de moindre qualité puisqu’elle est distribuée gratuitement.
J’invite les lecteurs à se faire une opinion par eux-mêmes. Je connais de très bons webzines comme YmaginaireS qui réalisent un travail remarquable (que ce soit pour les contenus ou la mise en page). J’ai sélectionné ce numéro d’Outremonde parce que le thème et les nouvelles m’ont particulièrement plu.
– Les Sirènes de Lambda Velorum de Hans Delrue
On retrouve du Wilheim Reich, de la science-fiction et des sirènes de l’espace dans cette première nouvelle barrée. L’idée est simple et intéressante.
– Les déchets Z d’Aurélie Wellenstein
De la SF dystopique sombre. Si vous croyez que la petite fille apeurée est la victime, vous n’êtes pas au bout du cauchemar.
– Chevaux-monstres (article d’Aurélie Wellenstein)
Articles sur les chevaux monstrueux.
J’avais déjà croisé l’œuvre d’Aurélie Wellenstein au détour de sa nouvelle « L’épouse du kelpie » dans l’anthologie Magie Celtique, aussi je ne m’étonne guère de la voir écrire sur la question des chevaux magiques. Le sujet est maîtrisé. L’article est rédigé de manière très souple et agrémenté d’illustrations.
– Notre mère de Philippe Deniel
SF militaire. Cette nouvelle rappelle beaucoup l’univers de WH40 000 avec des ultramarines engoncés dans leur armure de combat pour traquer des extra-terrestres. Au milieu de la troupe, un shaman use de magie pour vaincre les monstres qui sont… d’anciens humains.
– Trivial poursuite de Philippe Goaz
On continue avec de la light fantasy, autant dire de l’humour. L’histoire se situe dans un campement militaire mais l’originalité de la nouvelle tient surtout aux deux catégories de précogs. Je ne sais pas si j’emploie le bon terme pour retranscrire les pratiques magiques des « télépathes » qui peuvent lire soit une chose soit une autre.
– Step by step de l’illustration de Trivial Poursuite
L’illustrateur, Tony Patrick Szabo, explique les différentes étapes de son travail d’illustration pour la précédente nouvelle.
– Dans la peau de Thomas Spok
Une courte nouvelle rédigée sous la forme d’un journal intime (cf Horla). La narrateur raconte l’évolution de son tatouage et la lente disparition de sa personnalité.
– Angelus de Nicolas Valinor
Dans un monde post-apocalyptique envahi par les rats, un petit humain libère un ancien dragon.
Commentaire : Cette nouvelle est ma favorite aussi, comme à mon habitude, j’en dévoilerai le moins possible pour laisser les autres lecteurs se faire idée. Mais comment résister à cette histoire de dragon et de hordes de rats ?
– Un monstre qui vient de loin… (article de Didier Reboussin)
Petite chronique sur l’histoire d’un équipage qui survit dans le ventre d’un poisson géant.
– Les chasseurs dans la nuit de David Osmay
Histoire triste de vengeance. Le point fort de l’histoire tient évidemment à l’alternance des points de vue.
– Arthura de Cyrille de Sainte Maréville
Le narrateur sent une présence derrière lui.
Cette nouvelle traite du mystère de l’écriture et de la création. Le héros, un écrivain (attention aux jeux de mise en abyme !), crée un personnage et le suit.
Fred Katyn, Métaux lourds, recueil de nouvelles :
Résumé site: Métaux Lourds est un recueil de 6 nouvelles. Description du mal-être, de la torture de la culture forcée, de la haine de soi et de l’autre, ce livre troublant dérange, dégoûte un peu parfois, mais avant tout, fait réfléchir le lecteur. L’imaginaire de Fred Katyn est peuplé de monstres – réels ou fantasmés – de blondes improbables, de surhommes body-buildés, d’anti-héros pathétiques et minables. Son style tranchant, sans concession, frôlant l’insoutenable et la vulgarité, fait de ce livre un vrai régal de franchise.
Avis perso: Fred Katyn serait une sorte d’ancien libraire belge. Il livre ici un recueil de nouvelles dans un style étrange. C’est comme si un Houellebecq belge dopé aux frites avait emprunté la plume de Yasmina Khadra.
Comme son nom l’indique, on va manger des métaux lourds avec ce recueil, souvent au point d’être écœuré parce que la lecture laisse un arrière-goût de goudron. En lisant ce titre je pensais à une mouette engluée dans une marée noire et c’est souvent ce que vivent les personnages.
Chaque nouvelle est indépendante mais on repère assez vite des liens entre les histoires (notamment avec les personnages ou certaines récurrences).
– Avec nos poings d’acier
La première nouvelle est probablement la meilleure du recueil et nous met d’entrée les deux pieds dans la crasse et la gadoue. Le personnage principal, un bibliothécaire looser au dernier degré, réussit l’exploit de glisser de la nullité absolu aux milieux fascistes belges. Il fallait le faire. L’auteur a un style très vivant et on suit cette première nouvelle avec plaisir.
– Le messie de goudron
Monsieur Goudron c’est le clochard qui se tient au carrefour.
Ce qui peut surprendre (ou intriguer) le lecteur c’est que le personnage principal semble être souvent le même. C’est toujours un père divorcé un peu looser en difficultés.
Un attentat à la bombe se prépare et n’espérez pas une fin à la Walt Disney.
– Mon testament
La descente en enfer hallucinée et chaotique jusqu’à la mort.
Le héros est (encore) un bibliothécaire, obsédé sexuel, un peu looser, qui prétend s’appeler Fred Katyn (comme l’auteur du recueil). La nouvelle fait de l’humour second degré sur les paralittératures
– Forces occultes
Encore un personnage de looser fini, professeur de philologie et obsédé, qui aurait publié un recueil de nouvelles intitulé « forces occultes ». La nouvelle débute par une menace de licenciement
– L’ombre du jardin des gnomes
Le héros, Jérôme, encore un bibliothécaire looser, croise les « gnomes », surnom des handicapés mentaux. L’histoire détourne notre attention assez vite pour partir sur un nouveau mystère : l’œuf du Diable
– L’or d’Amsterdam
On part d’un héritage et, pour une fois, on s’attend à un dénouement heureux mais non. Jusqu’au bout, on patauge dans la crasse et la folie.
Le recueil présente toute une galerie de personnages plus antipathiques les uns que les autres mais le style de l’auteur fait que la lecture reste fluide et intéressante.
Le blog consacré au recueil: http://metauxlourds.canalblog.com/
Collectif « les fossoyeurs de rêves » (l’imaginarius), Histoires de bêtes féroces, 56 p
Un petit e-book sympa édité par l’équipe des « Fossoyeurs de rêves » aux Editions de l’Imaginarius.
– Lupus in the sky destroy de John Steelwood
Tout à fait mon style d’histoire. Dans un futur dystopique, on emploie les loups-garous pour un stupide jeu de télé-réalité. Avec la critique sociale en arrière-fond, l’auteur offre une histoire courte mais prenante avec des personnages bien campés. L’héroïne se change en garache et entre dans le combat.
– Le sang des aïeux par Romain Billot
Cette nouvelle verse davantage dans la fantasy historique en reprenant le mythe des sangus (simili loups-garous).
La nouvelle, malgré la neige omniprésente, a un petit côté « conflit israélo-palestinien » avec les luttes ancestrales qui se perpétuent et les tribus qui se massacrent régulièrement au nom d’une terre.
– La malédiction d’Okango de Gaelle Dupille
Des oiseaux qui attaquent les gens ? Je craignais le remake du cultissime Les oiseaux d’Hitchcock mais l’auteure évite la boulette du remake et offre une histoire, à l’américaine, sur une légende africaine.
Un village est mystérieusement la proie d’attaques d’oiseaux et les humains deviennent de plus en plus agressifs. Les héros, montés comme des héros de thrillers, mènent l’enquête.
Magie Celtique ― Avant-goût d’éternité (anthologie), Ed. Sortilèges
Envie de refaire le plein de Brocéliande, d’elfes et de magie ?
Quatrième de couverture: Magie celtique réunit six nouvelles fantasy inédites inspirées de la magie et des légendes celtes. Des textes à la fois modernes et enchanteurs qui nous emmènent au cœur des forêts légendaires et d’une nature toujours plus magique. Des personnages aussi connus que Merlin, Arthur et Morgane prennent vie pour de nouvelles aventures. Tandis que d’autres héros côtoient pour la première fois créatures féeriques et divinités, changeant à jamais leur vision de la vie, mais surtout de la mort. Franchissez le seuil de l’Autre Monde, en route pour un voyage ensorcelant à travers l’imaginaire.
Avis perso: Les Editions Sortilèges proposent une autre anthologie celtique, plus lumineuse. Comme la lecture remonte à une éternité, je ne me souviens plus de tous les détails mais je me rappelle clairement avoir préféré ce volume à l’autre anthologie celtique, tout simplement parce que les histoires finissent bien.
– In memoriam de Flora Greys
Histoire triste. On démarre avec la mort de l’amour du héros puis il découvre son héritage divin et se lance dans une mission.
– Mel de Kévin eïron Devis
L’histoire d’un jeune orphelin qui noue accidentellement un lien avec des créatures magiques de la forêt.
La chute est intéressante.
– Marwelna la Magicienne de Magali Herbert
L’histoire d’une vie. La narration s’étale souvent sur plusieurs années.
– Le chaudron des âmes d’Anne Rossi
Héroïc fantasy avec des anges. J’aime beaucoup. C’est probablement mon histoire favorite dans ce recueil. Une ange débarque du ciel épaulée par Merlin et Arthur pour affronter des démons et récupérer des artefacts légendaires.
– Les oubliés de Flora Greys
Un peu de chevalerie… Un paladin court se cacher dans la forêt de Brocéliande où une habitante décide d’outrepasser les lois locales pour le rencontrer et, plus tard, tisser une histoire d’amour.
– Uffin d’Elfenn
Et on termine avec l’histoire d’un enfant autiste. Comment ? Qu’est-ce que cette histoire vient faire dans cette anthologie me demanderez-vous ? J’ai cru à une erreur au début mais l’histoire est montée à la « King » : on part d’une réalité triste et grise pour introduire des éléments fantastiques et finalement basculer dans l’autre monde.
Enfin une histoire qui finit bien (sans sombrer dans la mièvrerie rose bonbon non plus).
Magie Celtique – Sombre rencontre (anthologie), Ed. Sortilèges :
Les éditions Sortilèges ont publié un recueil de nouvelles autour du thème de la magie celtique. C’est malheureusement le genre d’ouvrage qu’on ne trouve pas dans les rayons des grandes surfaces et qui gagne à être connu.
– Bientôt… de Florence Chevalier
La première nouvelle ouvre l’anthologie et donne le ton assez vite. On va lire beaucoup d’urban fantasy teintée du folklore de Bretagne (mais si vous avez acheté ce livre, c’était probablement votre souhait). Très bon style. L’histoire est bien écrite. Le thème ne m’a pas passionné (les peines de cœur d’une adolescente… trop girly pour moi) et pourtant j’ai lu la nouvelle d’une traite. J’ai été déçu par la fin (mais je ne dévoile rien).
Un mot sur l’auteur : Florence Chevalier a déjà publié deux nouvelles en anthologie et publiera prochainement son premier roman Plusieurs reflets dans le miroir aux éditions Valentina en novembre 2013.
– Le choix du korrigan de Frédéric Gobillot
Encore une très bonne nouvelle, peut-être la meilleure du recueil. Le héros est moderne, il fait du parkour et souhaite devenir elficologue. La nouvelle a la « Supernatural touch » : Richard Marchant (avec un t) rencontre des obstacles surnaturels dans un monde résolument moderne.
– L’épouse du kelpie d’Aurélie Wellenstein
Il me semble avoir déjà lu un article sur les chevaux fantastiques dans un webzine, signé par cette auteure. Je savais à quoi m’attendre : une histoire de cheval aquatique. Et non ! Que vous sachiez ce qu’est un kelpie ou pas, l’histoire va vous surprendre. On suit les mésaventures d’une jeune femme mariée de force.
– Un trop long hiver de Marie Laneret
Exploitation du thème des deux mondes avec le passage de l’un à l’autre. Amusant, un petit côté « matrix ».
– La nuit de Samain de Nicolas Saintier
La nuit de Samain le voile entre les deux mondes devient poreux et les morts marchent parmi nous. L’auteur profite du thème pour écrire une histoire d’amour.
Mais qu’est-ce que c’est triste !
– Les engloutis de Céline Lacomblez
Et on finit avec une nouvelle de SF. Original ! C’est la « K. Dick touch » de l’anthologie. Dans une France recouverte par les sables, des survivants fouillent une cathédrale à la recherche de débris archéologiques mais ils ne s’attendaient pas à croiser une créature des anciens temps (« très anciens temps » pour le coup).
Dick, Rendez-vous hier matin, Août 1966
Titre original: « Your Appointment will be Yesterday »
On ne présente plus Dick, le grand ponte de la SF maintes fois adaptés au cinéma. Mais il livre avec cette nouvelle une réflexion originale sur le thème du temps.
Résumé : Rendez-vous hier matin raconte une histoire qui se déroule à l’envers (plus encore que le Memento de Nolan). On dé-écrit les livres en les effaçant petit à petit. Mais si on continue de remonter le temps, on va revenir au moment où on a conçu la machine, qui permettait ce jeu temporel, et la déconstruire, ce qui permettra un nouveau renversement temporel.
Com : Cette nouvelle est un classique de la SF qu’il faut avoir lu. On se met les neurones à l’envers et c’est bon. Dick renverse le cours normal du temps et en fait une sorte de tramway qui navigue entre deux points. Il est à noter que Dick n’est pas vraiment l’auteur de cette idée.
Platon, deux mille ans avant, avait proposé un mythe similaire où le temps fonctionnerait au sens inverse pendant dix mille ans. Les vieillards rajeunissent. Puis au bout d’une période, le temps reprendrait son sens normal.
Magie et Sorcellerie, Les Vagabonds du rêve n°3
Avec un titre pareil, on pourrait s’attendre à voir défiler des histoires de mages et de sorciers s’affrontant à coups de sortilèges mais ce n’est pas le cas. L’imagination des auteurs nous offre un florilège de situations oniriques divertissantes. La magie est ici polymorphe et imprévisible.
– La magie démo par Julien Dorvennes
On commence par un article sur la magie.
– Ataraxie du néant par Thébaide Thébaine
Dans un monde soumis à une sorte de puritanisme, quelques mages font de la résistance et un jeune arrive au monastère, son potentiel est rapidement détecté.
Commentaire : Trop court ! L’histoire est intéressante et on regrette qu’elle se termine aussi vite.
– La fée de Londres par Philippe Heurtel
De la fantaisy qui verse vite dans la SF. La fée vit dans une petite boule de cristal. Sa propriétaire en chaise roulante est seule. Pour l’aider, la magicienne anime son robot. Une love story étrange et légèrement glauque naît ainsi et…
Com: C’est le genre d’histoire que je n’attendais pas mais qui traite habilement des questions du bonheur et de la « bulle ».
– Souffrir c’est mourir un peu par Jean-Michel Calvez
L’escapade des amoureux est ici prétexte à une histoire terrifiante de sorcière.
– L’Hôte par Malvert
Un peu de fantaisy classique. Kendall est la sentinelle d’un avant-poste déserté depuis des années. Suite à un combat, il héberge un blessé. Au fur et à mesure que son hôte reprend des forces, le héros s’affaiblit. Mais qui est donc cet inconnu ?
Commentaire: L’histoire paraît classique au sens où elle rentre dans les codes. Cela ressemble à du Weird Tales, version Howard, et j’ai beaucoup aimé.
– L’Amant de madame la rectrice par Martine Loncan
Fantaisy light. Drôle. Le recteur est trop absorbé par les problèmes de sa femme et toute l’université s’en trouve perturbée. Les enseignants cherchent des solutions.
C’est doublement drôle pour les clins d’oeil au monde de l’université.
– Pour une poignée de thuns par Eric Boisseau
Les nains de jardin ne sont pas inoffensifs. Ils sont même antipathiques mais heureusement pour nous une antique malédiction les statufient dès qu’ils se trouvent à proximité d’un humain.
L’auteur retourne deux fois le figure du nain et le résultat donne une nouvelle assez amusante.
– Juste retour des choses par Antoine Lencou
Et on termine avec une histoire de voyante. Je ne vais pas dévoiler la fin mais je trouve dommage de terminer l’anthologie par une nouvelle sérieuse et sombre.
L’anthologie compte aussi une nouvelle hors-thème : le sourire de Mona Lisa. Cette dernière est pas mal mais j’ai du mal à comprendre son placement dans l’anthologie.
Chronique: Les numéros 1 de la fantaisy
J’avais très envie d’écrire une chronique sur les origines du genre fantasy mais je ne savais pas par quel bout prendre le problème. Plutôt que de me lancer dans une explication universitaire barbante de 878 pages, j’ai préféré sélectionner des textes emblématiques.
Robert E. Howard, Croc et lance, 1925
Howard, c’est le papa de Conan le Barbare, autant dire qu’il a pratiquement fondé le genre heroïc fantasy. Très jeune, il se lance dans l’écriture et tente de vendre des histoires à Weird Tales. Sa toute première nouvelle, publiée en juillet 1925, met en scène un homme préhistorique.
Résumé : Une jeune femme des cavernes observe à la dérobée son amant, l’artiste de la tribu. Mais elle est enlevée par un sauvage homme de Neandertal.
Cette nouvelle est comme un diamant, parfaitement ciselé. Ce n’est pas la meilleure nouvelle d’Howard mais elle est taillée de A à Z et pourrait servir de modèle pour quiconque veut apprendre à écrire. Limpide et prenante à la fois.
Howard était un sacré travailleur. On lui doit 400 nouvelles dans des styles variés (boxe, western, fantaisy…).
Tolkien, Ainhulindalë
J’imagine qu’après l’adaptation au cinéma de la trilogie du Seigneur des anneaux et plus récemment celle du Hobbit, personne n’ignore qui est Tolkien. Si ? Tolkien était un professeur de linguistique qui, pour passer le temps, inventa des langues disparues (comme l’elfique) et dans la foulée construisit un univers pour que des gens puissent parler ces langues.
Les romans de Tolkien comportent de nombreux passages qui traitent du passé des peuples ou du monde. Etant donné que la compagnie de l’anneau débute à la fin du troisième âge, on se demande ce qui s’est passé avant. Avant les anneaux et toute la quincaillerie ?
Ainhulindalë est un texte court, beaucoup moins connu, qui retourne aux sources et raconte la genèse de l’univers. Ici pas de combat, pas de gouffre de Helm, pas d’elfe.
Résumé : Les dieux se rassemblent et entament un morceau de musique pour dessiner le monde et ce qu’il deviendra. Morgoth (le dieu méchant) en profite pour faire entendre sa voix discordante et de là viendra le chaos dans le monde.
C’est original ! Ici la création de l’univers passe par la musique. Contrairement à beaucoup d’auteurs, Tolkien n’est pas allé puiser son inspiration dans des mythologies déjà existantes. Il a choisi de générer son monde d’une manière intéressante.
Un texte incontournable pour tous les fans de Tolkien.
Moorcock : Sojan
Avant Elric le nécromancien, il y avait Sojan. Sojan the swordman. Sojan le mercenaire. Le héros du jeune Moorcock, âgé d’à peine quinze ans !
Quand on connait le niveau de français moyen d’un élève de quinze ans, on rêve d’avoir plus de Moorcock. L’histoire de Sojan est basique. Un héros costaud, avec des armes, cherche l’aventure. Comme dit l’expression populaire, l’histoire « ne casse pas trois pattes à un canard » mais on lit déjà les bases du style de Moorcock. La simplicité n’est pas un défaut. L’auteur s’est beaucoup inspiré de Burroughs (le papa de Tarzan) et reproduit son style.
Moorcock quitta l’Angleterre pour la France et y fit ses premières armes. Il écrivait des textes et des livres pour gagner de quoi survivre. Il publia le cycle du Guerrier de mars et bien vite les premières aventures d’Elric.
Moorcock, le songe du comte Aubec
Plutôt que de vous parler de La Cité qui rêve, la fameuse nouvelle qui a lancé le sorcier-barbare-albinos le plus célèbre de la Sword and Sorcery, je vais revenir sur une autre nouvelle de Moorcock écrite bien après : le songe du comte Aubec.
Comme pour Tolkien, Moorcock remonte aux sources et explique la création de son univers, ou du moins d’un bout de l’univers. Avant la Chine et l’Inde, plusieurs civilisations se succédèrent et bien avant encore Melniboné régna sur le monde. Et avant ?
On suit le comte Aubec dans une aventure aux confins du monde. Il doit affronter une sorcière qui vit au bord du chaos pour s’emparer de son château, dernier point du monde connu à conquérir. La nouvelle suit le déroulement d’un Donjon et dragon pour un aventurier de niveau 5 à 10. Le héros affronte quelques monstres, des illusions et un golem.
La sorcière propose alors au comte bien plus que son château : de nouvelles terres. Car le Chaos bouillonnant qu’on aperçoit depuis la fenêtre pourrait se transformer et donner de nouveaux pays, de nouvelles civilisations.
Précisons rapidement que l’univers de Moorcock ne se définit pas par l’affrontement du bien et du mal mais par l’opposition de la Loi et du Chaos, ce dernier étant plus considéré comme une force créative.
Aubec accepte le marché et la nouvelle le quitte au moment où il s’engage sur ce nouveau continent inconnu. D’après le narrateur, les nouveaux pays apparus possèdent déjà leur civilisation et leurs souvenirs. Et c’est extraordinaire ! Moorcock crée du passé à rebours, à la manière d’un écrivain, mais ici comme un démiurge. L’Histoire se n’écrit pas de manière linéaire, à la manière d’une flèche (ou à la manière d’un cercle), mais comme une double flèche. Plus les héros avancent dans le temps, dans l’aventure, et le plus le passé s’écrit derrière eux.
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