Corrigé du bac blanc STI2D 20150

Posted on février 14th, 2015 in En terminale

Corrigés des sujets du bac blanc 2015 pour Digoin

Les notes vont de 0 à 17. Moyenne de classe à 7,6.

Sujet 1 : Toutes les opinions se valent-elles ?

 

Analyse des termes du sujet : L’énoncé du sujet semble supposer que toutes les opinions ne se valent pas. Un certain relativisme culturel peut laisser supposer que chacun peut exprimer son opinion mais on constate dans les faits que certaines (parmi les plus extrêmes) sont à proscrire.

Introduction

Si un comique formule une blague raciste, peut-il dire que son opinion en vaut une autre ?

Pour le sens commun, les opinions se valent toutes. Au nom de quel critère supérieur pourrait-on affirmer que celui qui aime la café a plus raison que celui qui aime le thé. Il ne s’agit pas d’un domaine doté d’une hiérarchie comme les mathématiques. Et pourtant, on pointe certaines opinions inacceptables qui ne sont aucunement égales aux autres. Qui oserait mettre sur un pied d’égalité les idées d’un Hitler et d’une mère Térésa ?

Par conséquent, on en vient à formuler la problématique suivante : Toutes les opinions sont-elles également acceptables ? OU peut-on accepter toutes les opinions ? (OU Peut-on hiérarchiser les opinions ?)

 

Plan

Partie 1 : Thèse A : Oui toutes les opinions se valent

Argument 1 : Relativisme (esthétique). En art, il n’existe pas de classification permettant d’affirmer qu’une œuvre est plus réussie qu’une autre. Le jugement dépend des goûts de chacun.

 

Exemple : On ne peut pas dire que les Epoux Arnolfi sont plus réussis que le carré noir sur fond blanc.

 

Argument 2 : Epicure : lettre à Hérodote. Le philosophe Epicure défend dans une lettre l’idée que si deux théories différentes fonctionnent pour expliquer un phénomène (météorologique par exemple), on peut les accepter également.

 

Ex : On a dépassé la physique de Newton mais puisqu’elle suffit à calculer les déplacements d’objets de notre monde, on peut bien l’accepter.

 

Argument 3 : La liberté : au nom de quel critère supérieur voudrait-on imposer une hiérarchie des opinions ? Si certaines personnes ont envie de croire au Monstre du Loch Ness ou au yéti, cela ne pose pas plus de problème que de croire aux extra-terrestres. Dans le champ des opinions non vérifiées (et non vérifiables), il est impossible de réaliser des comparaisons.

 

Exemple : On peut croire au wendigo en Amérique du Nord et au chupacabrac en Amérique latine.

 

TRANSITION : Néanmoins les opinions étudiées dans la première partie sont acceptables parce qu’elles ont une utilisé pratique et n’entraînent pas de conséquences démesurées. S’il s’avère que le monstre du Loch Ness n’existe pas, la vie du croyant ne sera pas bouleversée. Mais comment traiter les croyances qui dirigent des actions ayant des effets ? Par exemple, dans le cas de l’homicide, il n’est pas possible de dire que les opinions « le meurtre est un crime odieux » et « le meurtre est acceptable » sont équivalentes parce qu’elles entraînent des comportements différents.

 

Partie 2 : Thèse non A : Non, toutes les opinions ne se valent pas.

 

Argument 1 : Inégalité morale. Sur le plan moral, les civilisations ont établi des hiérarchies. Certaines valeurs priment sur d’autres (comme la qualité prime sur le défaut). Ces échelles de valeur peuvent avoir une source religieuse (ex : les Dix Commandements) ou une source philosophique (Kant, Mill).

 

Exemples : La liberté est meilleure que l’esclavage.

L’amour est meilleur que la haine.

La concorde est meilleure que la violence gratuite.

 

Argument 2 : Certaines opinions sont interdites car fausses ou dangereuses. La législation française interdit les discours qui appellent à la haine car ce genre d’opinion serait inacceptable notamment à cause des conséquences.

 

Exemple : L’opinion nazie « les Juifs sont inférieurs et doivent être exterminés » est inacceptable, d’abord parce qu’elle est fausse et ensuite parce que ce genre d’idée a provoqué des millions de morts.

 

Argument 3 : Education esthétique. Même dans le domaine artistique où on considère que tous les goûts sont possibles, il est possible d’établir une hiérarchie des valeurs. Sans tomber dans les jugements arbitraires, certains philosophes postulent une éducation de la sensibilité esthétique.

 

Ex : Un enfant qui n’a jamais fréquenté de musées dans sa vie peut ne pas comprendre certaines œuvres alors que celui qui a une grande culture sera plus réceptif, même à des œuvres déconcertantes. Les recherches en sociologie ont établi que plus une personne a une culture élargie plus elle écoute de styles de musique différents.

 

 

TRANSITION : Et alors ? Avons-nous répété le paradoxe en affirmant que certaines valeurs sont égales et d’autres non ? Une solution pourrait consister à établir une classification des valeurs : d’un côté les opinions négligeables qu’on peut mettre sur un pied d’égalité et de l’autre les opinions inégales qu’on peut hiérarchiser. Mais on pourrait aller plus loin et réinterroger les présupposés du sujet.

 

Partie 3 : Dépasser l’apparente opposition. Thèse C (A et non A) : Certaines sont égales et pas d’autres.

 

Ici les élèves sont relativement libres selon la construction opérée et le fil rouge choisi.

 

Argument 1 : En démocratie, les opinions non dangereuses sont égales. La liberté d’expression permet à chacun de s’exprimer comme il le souhaite. Tant que les opinions n’engagent que la personne et n’ont pas de conséquences malheureuses.

 

Ex : croire au monstre du Loch Ness n’est pas grave.

 

Argument 2 : Les opinions peuvent être plus ou moins fondées et donc plus ou moins crédibles. Si une opinion est émise par une personne sans preuve, on peut ne pas en tenir en compte. Mais si des milliers de personnes établissent une conjecture à partir d’indices récurrents (comme le font les scientifiques à la recherche d’une nouvelle découverte), ce n’est pas encore une connaissance mais c’est déjà une opinion dotée d’une certaine crédibilité.

 

 

Exemple : la croyance au monstre du Loch Ness est autorisé mais moins crédible que la croyance au « quark », particule subatomique.

 

Argument 3 : L’enjeu de la démocratie est de défendre une grande liberté de pensée sans sombrer dans un relativisme mou. Il s’agit de laisser à chacun le champ libre pour exprimer toutes ses opinions mais de poser simultanément un cadre pour ne pas tomber dans des opinions inacceptables. (L’élève habile peut conclure ici que ce paradoxe empêche de fournir une réponse dogmatique définitive).

 

Exemple : Il est autorisé de croire aux extra-terrestres et d’écrire un livre sur le sujet mais la législation française ne permet pas d’écrire un livre contenant des propos négationnistes (qui nieraient certains événements de la seconde guerre mondiale comme les camps d’extermination).

 

 

Sujet 2 : L’expérience est-elle source de vérité ?

Analyse des termes du sujet : L’énoncé du sujet semble supposer que l’expérience serait surtout source d’erreur. Par exemple, on pouvait partir sur les limitations des sens ou au contraire axer sur l’expérience scientifique qui obéit à une méthode rigoureuse.

Introduction

Bruno Latour, l’épistémologue, s’étonnait dans son livre La vie de laboratoire de constater que les laboratoires scientifiques engloutissent des budgets de plusieurs millions pour produire quelques articles de recherche. Faut-il qu’ils soient importants. Son ouvrage suit notamment un laboratoire américain qui met huit ans pour découvrir une seule protéine. La démarche scientifique tend à montrer que l’expérience est la seule voie possible pour accéder à la vérité.

Pour le sens commun, l’expérience est un premier contact avec la réalité. Je fais l’expérience du froid ou de la douleur. Elle m’apprend quelque chose. Une expérience commune consiste à mettre sa main dans le feu et à se brûler. Tous ceux qui ont vécu cette expérience savent qu’il ne faut pas laisser sa main dans le feu donc elle est source de connaissance et donc de vérité. Et pourtant on pourrait objecter que toutes les expériences n’apportent pas la vérité car les sens qui nous permettent d’expérimenter sont faussés par des illusions.

Par conséquent, on en vient à formuler la problématique suivante : toutes les expériences sont-elles source de vérité ? (OU sont-elles illusoires ?)

 

Plan

Partie 1 : Thèse A : Oui les expériences apportent la connaissance.

Argument 1 : Les sens permettent les premières expériences et les humains s’y fient.

 

Exemple : Le fossé. Même si on sait qu’il existe des illusions, quand on voit un fossé on l’évite. Ou quand on traverse une route, on regarde si des voitures passent.

 

Argument 2 : L’expérience répétée. L’induction. Si on vit plusieurs fois une expérience, on finit par en tirer une connaissance.

 

Ex : Si on se brûle plusieurs fois en touchant le feu, on comprend que le feu brûle.

 

Argument 3 : L’expérience scientifique apporte une connaissance vraie. Par le biais d’une expérience cruciale, on peut trancher entre deux théories et donc accéder à la connaissance.

 

Exemple : Pascal a pu avec l’expérience des deux demi-sphères prouver l’existence du vide et par conséquent valider l’hypothèse « le vide existe » et infirmer la thèse aristotélicienne selon laquelle « il n’y a pas de vide ».

 

TRANSITION : La connaissance vraie n’est pas vraie mais seulement « provisoirement vraie ». Les connaissances scientifiques qui se prévalent d’un haut degré de certitude sont sans cesse remises en cause et dépassées. Par conséquent, l’expérience ne garantit pas un accès à la vérité.

 

Partie 2 : Thèse non A : Non, l’expérience conduit au mieux à des conjectures vraisemblables mais jamais à la vérité.

 

Argument 1 : Illusions des sens. Depuis l’Antiquité, les Humains ont identifié plusieurs illusions dont les sens sont victimes.

 

Exemple : « le bâton dans l’eau », la diffraction de la lumière, montre que l’expérience de la vue ne conduit pas à des connaissances assurées.

 

Argument 2 : L’expérience est toujours limitée (fausse induction, cygne noir). Même si on a fait plusieurs fois une expérience, rien ne garantit que la énième tentative ne viendra pas infirmer notre conclusion.

 

Exemple : Le cygne noir. Pendant des siècles, les gens ont cru que les cygnes étaient blancs parce qu’ils voyaient des milliers de cygnes blancs. Mais la découverte de cygnes noirs au sud de l’Australie au vingtième siècle a infirmé cette induction.

 

Argument 3 : Jamais de vérité définitive. L’histoire des sciences montre que les théories scientifiques remplacent les précédentes. Aucune théorie n’est achevée.

 

Exemple : la physique d’Einstein a remplacé celle de Newton qui s’est elle-même substituée à celle d’Aristote.

 

TRANSITION : Et alors ? L’élève pouvait conclure sur ce paradoxe. L’expérience est une première voie d’accès à la connaissance et donc à la vérité mais n’y parvient jamais. Toutefois il pouvait être intéressant de rédiger une troisième partie qui réinterrogerait les présupposés du sujet.

 

Partie 3 : Dépasser l’apparente opposition. Thèse C (A et non A) : l’expérience est nécessaire mais insuffisante pour atteindre la connaissance.

 

Ici les élèves sont relativement libres selon la construction opérée et le fil rouge choisi.

 

Argument 1 : Histoire des sciences. L’expérience des sens est la première étape. Dans l’Antiquité, Aristote choisit de baser sa méthode scientifique sur l’observation (plutôt que sur les croyances religieuses). Il est dans l’illusion mais sa méthode permet une première approche de la connaissance.

 

Exemple : Aristote se trompe quand il affirme que la nature a donné des nageoires aux poissons pour nager et des ailes aux oiseaux pour voler mais son œuvre de biologiste a fourni la première classification des êtres vivants et fait ainsi progresser la connaissance.

 

Argument 2 : Deuxième étape : le protocole scientifique. Les dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècle ont perfectionné la méthode scientifique (hypothèse/expérience/conclusion) et permis l’évacuer les observations anecdotiques pour se concentrer sur des conclusions confirmées par de nombreuses expériences.

 

Exemple : Pasteur réfute la croyance de la « génération spontanée » grâce à une expérience (qui est toujours en cours).

 

Argument 3 : Réinterroger l’expérience et pousser la rigueur. La science de 2015 ne prétend pas connaître la vérité ni même l’atteindre mais cette prudence intellectuelle permet de pousser sans cesse plus loin la recherche pour interroger sans cesse les théories et ne pas s’enliser dans des conceptions fausses.

 

Exemple (choisissez n’importe quelle théorie scientifique actuelle et montrez qu’elle est encore mise en question)

 

 

Pour aller plus loin : vous pouvez lire mon article affiché à l’Hexagone sur le film Edge of tomorrow et la dissertation sur le rapport entre l’expérience et la connaissance.

 

Questions sur le texte de Spinoza.

Problème du relativisme (Ce sujet majoritairement sélectionné sera revu en classe à la fin du bonheur)

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