Category Archives: En terminale

Schopenhauer: L’impossible satisfaction des désirs

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            Entre les désirs et leurs réalisations s’écoule toute la vie humaine. Le désir, de sa nature, est souffrance ; la satisfaction engendre bien vite la satiété ; le but était illusoire ; la possession lui enlève son attrait ; le désir renaît sous une forme nouvelle, et avec lui le besoin ; sinon, c’est le dégoût, le vide, l’ennui, ennemis plus rudes encore que le besoin. ― Quand le désir et la satisfaction se suivent à des intervalles qui ne sont ni trop longs, ni trop courts, la souffrance, résultat commun de l’un et de l’autre, descend à son minimum ; et c’est là la plus heureuse vie. Car il est bien d’autres moments, qu’on nommerait les plus beaux de la vie, des joies qu’on appellerait les plus pures ; mais elles nous enlèvent au monde réel et nous transforment en spectateurs désintéressés de ce monde ; c’est la connaissance pure, pure de tout vouloir, la jouissance du beau, le vrai plaisir artistique ; encore ces joies, pour être senties, demandent-elles des aptitudes bien rares ; elles sont donc permises à bien peu, et, pour ceux-là même, elles sont comme un rêve qui passe ; au reste, ils les doivent, ces joies, à une intelligence supérieure, qui les rend accessibles à bien des douleurs inconnues du vulgaire plus grossier, et fait d’eux, en somme, des solitaires au milieu d’une foule toute différente d’eux ; ainsi se rétablit l’équilibre. Quant à la grande majorité des hommes, les joies de la pure intelligence leur sont interdites, le plaisir de la connaissance désintéressée les dépasse ; ils sont réduits au simple vouloir.

Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme volonté et comme représentation, livre IV, §57

Ryle: L’esprit n’est pas un « fantôme dans la machine »

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Dire que nous agissons avec intelligence signifie-t-il que nous menons une double vie, l’une matérielle, l’autre spirituelle ? Dénonçant le dualisme, Ryle conteste la pertinence de la conception de l’esprit comme une réalité distincte de la matière. Continue Reading

Thomas d’Aquin: « L’intellect possible » indépendant du corps

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Le spiritualisme chrétien affirme l’indépendance de l’âme relativement au corps. Thomas d’Aquin souligne que ce qui dépend du corps ne peut saisir l’universel : il faut en conséquence que l’activité proprement intellectuelle soit étrangère au corps. Continue Reading

Descartes: L’union de l’âme et du corps

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[…] je remarque une grande différence entre ces trois sortes de notions, en ce que l’âme ne se conçoit que par l’entendement pur ; le corps, c’est-à-dire l’extension, les figures et le mouvement se peuvent aussi connaître par l’entendement seul, mais beaucoup mieux par l’entendement aidé de l’imagination ; et enfin, les choses qui appartiennent à l’union de l’âme et du corps ne se connaissent qu’obscurément par l’entendement seul, ni même par l’entendement aidé de l’imagination ; mais elles se connaissent très clairement par les sens. D’où vient que ceux qui ne philosophent jamais, et qui ne se servent que de leurs sens, ne doutent point que l’âme ne meuve le corps, et que le corps n’agisse sur l’âme ; mais ils considèrent l’un et l’autre comme une seule chose, c’est-à-dire ils conçoivent leur union : car concevoir l’union qui est entre deux choses, c’est les concevoir comme une seule. Et les pensées métaphysiques, qui exercent l’entendement pur, servent à nous rendre la notion de l’âme familière ; et l’étude des mathématiques, qui exercent principalement l’imagination en la considération des figures et des mouvements, nous accoutume à former des notions du corps bien distinctes ; et enfin, c’est en usant seulement de la vie et des conversations ordinaires, et en s’abstenant de méditer et d’étudier aux choses qui exercent l’imagination, qu’on apprend à concevoir l’union de l’âme et du corps.

DESCARTES, Lettre à Elisabeth du 28 juin 1643 Continue Reading

Platon : Peut-on comprendre la réalité comme un simple agencement mécanique d’éléments matériels ?

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 Platon, par la bouche de Socrate, dénonce ici le caractère réducteur d’une telle conception. Continue Reading

Nietzsche: Le sujet conscient : une fiction grammaticale

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« Il est pensé : donc il y a un sujet pensant », c’est à quoi aboutit l’argumentation de Descartes. Mais cela revient à poser comme « vraie a priori » notre croyance au concept de substance : dire que s’il y a de la pensée, il doit y avoir quelque chose qui pense, ce n’est encore qu’une façon de formuler, propre à notre habitude grammaticale qui suppose à tout acte un sujet agissant. Bref, ici déjà on construit un postulat logique et métaphysique, au lieu de le constater simplement… Par la voie cartésienne on n’arrive pas à une certitude absolue, mais seulement à constater une très forte croyance. Continue Reading

Leibniz: L’identité morale de la personne

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Je ne voudrais point dire non plus que l’identité personnelle et même le soi ne demeurent point en nous et que je ne suis point ce moi qui ai été dans le berceau, sous prétexte que je ne me souviens plus de rien de tout ce que j’ai fait alors. Il suffit pour trouver l’identité morale par soi-même qu’il y ait une moyenne liaison de conscienciosité d’un état voisin ou même un peu éloigné à l’autre, quand quelque saut ou intervalle oublié y serait mêlé. Ainsi, si une maladie avait fait une interruption de la continuité de la liaison de conscienciosité, en sorte que je ne susse point comment je serais devenu dans l’état présent, quoique je me souviendrais des choses plus éloignées, le témoignage des autres pourrait remplir le vide de ma réminiscence. On me pourrait même punir sur ce témoignage, si je venais de faire quelque mal de propos délibéré dans un intervalle, que j’eusse oublié un peu après par cette maladie. Et si je venais à oublier toutes les choses passées, et serais obligé de me laisser enseigner de nouveau jusqu’à mon nom et jusqu’à lire et écrire, je pourrais toujours apprendre des autres ma vie passée dans mon précédent état, comme j’ai gardé mes droits, sans qu’il soit nécessaire de me partager en deux personnes, et de me faire hériter de moi-même. Et tout cela suffit pour maintenir l’identité morale qui fait la même personne.

LEIBNIZ, Nouveaux essais sur l’entendement humain, Livre II, chap27

Locke: La conscience, principe de l’identité personnelle

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Il n’y a que la conscience qui puisse unir en une même personne des existences éloignées, et non l’identité de substance. Car, quelle que soit la substance, quelle que soit sa structure, il n’y a personne sans conscience : [ou alors] un cadavre pourrait être une personne, aussi bien que n’importe quelle substance sans conscience. Continue Reading

Descartes : je suis, j’existe

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Archimède, pour tirer le globe terrestre de sa place et le transporter en un autre lieu, ne demandait rien qu’un point qui fût fixe et assuré. Ainsi j’aurai droit de concevoir de hautes espérances, si je suis assez heureux pour trouver seulement une chose qui soit certaine et indubitable.

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Nietzsche: Pourquoi vouloir ne pas tromper ?

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La volonté de vérité, une volonté de mort ?

« Donc la foi dans la science, cette foi qui existe en fait d’une façon incontestable, ne peut avoir son origine dans un calcul utilitaire ; elle a dû se former au contraire malgré le danger et l’inutilité de la « volonté de vérité », malgré le danger et l’inutilité de la « vérité à tout prix », danger et inutilité que la vie démontre sans cesse. (Vérité « à tout prix » ! Nous savons trop bien ce que c’est, nous ne le savons hélas que trop, quand nous avons offert sur cet autel, et sacrifié de notre couteau, toutes les croyances, une à une !)

« Vouloir la vérité » ne signifie donc pas « vouloir ne pas se laisser tromper », mais, – et il n’y a pas d’autre choix- : « vouloir ne pas tromper les autres ni soi-même », ce qui nous ramène dans le domaine moral.

Qu’on se demande sérieusement en effet : « Pourquoi vouloir ne pas tromper ? », surtout s’il semble – et c’est bien le cas ! – que la vie soit montée en vue de l’apparence, j’entends qu’elle vise à égarer, à duper, à dissimuler, à éblouir, à aveugler, et si, d’autre part, en fait, elle s’est toujours montrée sous son plus grand format du côté des fourbes (polytropoi) les moins scrupuleux ? Interprété timidement, ce dessein de ne pas tromper peut passer pour donquichotterie, petite déraison d’enthousiaste ; mais il se peut qu’il soit aussi quelque chose de pire : un principe destructeur ennemi de la vie… « Vouloir le vrai » ce pourrait être, secrètement, vouloir la mort. »

Nietzsche, Le Gai Savoir (1881-1887), § 344, trad. A. Vialatte

 

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