Chronique 33: La Horde du Contrevent d’Alain Damasio0
Nous avons consacré cinq mois de nos vies pour concevoir un petit jeu vidéo en hommage à ce livre donc les plus perspicaces d’entre vous ont déjà deviné qu’on l’a apprécié (beaucoup).
La horde du Contrevent, c’est l’histoire d’une troupe formée par 23 personnes (le nombre varie selon les recrues et les morts) qui tente d’aller au bout du monde.
C’est-à-dire ? demandez-vous.
La civilisation a été bâtie à l’ouest et les deux pôles sont couverts de glace donc ils cherchent à aller à l’est.
Et alors? Où est le problème?
Le Vent. Un vent violent et interminable souffle d’est en ouest, balayant tout (y compris les constructions humaines) d’où le nom de la horde. Leur boulot: contrer le vent.
Et pourquoi ils ne prennent pas un bateau volant pour aller au bout ?
Parce que c’est interdit. Il faut contrer avec le corps. Le voyage importe autant que la destination.
Mais s’ils vont toujours tout droit… ils vont pas finir par faire le tour de la…
Chut!! Ne spoilez pas la fin! Vu que Damasio a opté pour une numérotation inversée on devine assez tôt la fin du roman. Et c’est là un point intéressant.
L’auteur assume complètement ses influences philosophiques (Nietzsche et Deleuze). En tant que professeur de philosophie je me suis amusé à surligner tous les passages et à noter tous les clins d’oeil.
Oh mon Dieu! diront certains. Vous écrivez sur les livres?! Blasphème!
Ce ne sont pas livres « sacrés » non plus. Un roman est fait pour vivre. Et je pense que c’est dans l’esprit du livre de réveiller et d’inciter à l’action.
Bref, étant donné les références philosophiques, on comprend, comme dans Matrix Reloaded, qu’il n’y a pas de « source » ou de « principe premier » (cher à la philosophie antique). Dans la vie, on en bave et on meurt. Point de paradis. Point de justice.
Mince alors! Et les gentils battent pas les méchants à la fin ?
…
Non.
Et le héros n’embrasse pas l’héroïne à la fin?
Non plus.
Alors quel est l’intérêt du roman?
Le voyage. C’est le voyage qui importe, car il symbolise la vie. Ce n’est pas la destination (la mort) qui importe mais ce qu’on fait pendant la durée de cette vie. On est en mouvement, on pense, on évolue. Et c’est ce qu’on lit pendant 700 pages.
Petite anecdote pour finir: La Horde du Contrevent est un best-seller français (120 000 exemplaires vendus). Des adaptations sont prévues en BD, en série animée et en jeu vidéo. Le livre est peu connu hors de notre pays et c’est un peu gênant pour trouver des financements du coup nous avons conçu un jeu vidéo pour montrer que le public français est motivé. Oui, en France, nous sommes prêts pour la fantasy et la SF.
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