Chronique n°24 : Joseph Delaney, Les sorcières de l’épouvanteur, 20090
Chronique n°24 : Joseph Delaney, Les sorcières de l’épouvanteur, 2009
On va probablement me faire remarquer que la série Spook, l’épouvanteur en français, appartient au registre de la littérature jeunesse et que, par conséquent, elle n’entre pas dans le cadre du concours JLNN. Certes, Bayard jeunesse a repris la licence pour l’exploitation commerciale mais le contenu reste assez adulte. Est-il raisonnable de faire lire aux petits enfants des histoires de bébés dévorés par des sorcières ? Les contes de nos campagnes le faisaient bien mais la force de Delaney réside dans une certaine capacité de description.
On est loin du Walt Disney quand les femmes font des fausses couches et que les enfants se font tuer de manière atroce (le cas du prédécesseur de Tom est particulièrement édifiant).
Pour ceux qui ne connaissent pas la série Spook, c’est l’histoire d’un enfant de douze ans dans une sorte d’Angleterre fictive du dix-huitième siècle : la Comté. Difficile de dater précisément. Les soldats possèdent des canons (on serait donc après la bataille de Crécy) mais la révolution industrielle n’a pas encore eu lieu. Au sait que des méchants envahisseurs viennent du sud (salauds de français !). Le héros a l’occasion de voyager vers l’Irlande en passant par l’île de Man (donc pas de doute sur l’emplacement).
Tom, le héros, doit trouver du travail. Oui, en Angleterre, on commence à travailler à douze ans. Le gamin pourrait devenir forgeron ou serrurier mais, non, il va devenir épouvanteur. C’est une sorte de chevalier-prêtre exorciste-sorceleur mais sans les super pouvoirs. Le boulot du gamin consiste à dégommer des sorcières et des monstres qui boulottent des humains au quotidien. Personnellement, si j’étais le parent du gosse, je ne l’enverrais pas faire ça…
La série suit les aventures du jeune Tom, de son amie Alice (une sorcière qui oscille entre le bien et le mal) et le vieil épouvanteur, John Gregory (le maître). J’aime bien l’état d’esprit de la série. On reste dans un franc manichéisme avec d’un côté les méchants et de l’autre les gentils mais sans jamais verser dans la naïveté mielleuse de Walt Disney. Le héros triomphe par son sérieux, son courage et très souvent par chance (merci le scénariste). Cela ne l’empêche pas de perdre un proche par volume.
Les sorcières de l’épouvanteur est un recueil de nouvelles qui complète l’univers de la série en développant le background de certains personnages. Je ne conseille pas de démarrer la saga par ce volume. C’est davantage un complément pour les fans.
– Meg Skelton
John Gregory est un vieux misogyne qui passe son temps à critiquer les femmes et les sorcières. Il fait preuve d’une intolérance stricte. Pourtant, à partir du troisième volume, l’auteur révèle qu’il a eu une histoire d’amour avec une sorcière, qu’il garde enfermée dans sa maison d’hiver depuis des décennies. La nouvelle Meg revient sur cet amour de jeunesse.
– Dora la Cracheuse
Je précise que j’ai énormément apprécié cette nouvelle (comme les deux suivantes) parce qu’elle donne la parole à un personnage maléfique. C’est très proche de mon style. L’histoire est courte mais plaisante.
– Grimalkin
C’est l’occasion pour Joseph Delaney de revenir sur les origines de la sorcière guerrière et les événements marquants de sa vie : son enfant, sa rencontre avec le Malin, etc.
– Alice et le mangeur de cerveaux
Alice, l’amie de Tom, a l’habitude de camper un second rôle mais elle se trouve à l’honneur dans cette nouvelle qui dévoile ses aventures de jeunesse.
– La Banshie
Une aventure inédite de Tom, à l’époque de son apprentissage auprès d’Arkwright. La nouvelle raconte sa première confrontation avec la Morrigan. Cette dernière nouvelle me paraît un peu hors-sujet dans ce recueil. Elle présente une sorte d’épisode oublié qui permet d’annoncer le fameux volume 8 (ou 9 ?) qui se déroule en Irlande.
Tom étant déjà le héros de la série, on connait toute sa vie en détails. Il aurait été peut-être plus intéressant de développer la vie d’un autre personnage délaissé (le gobelin de la maison, le frère de l’épouvanteur ou un ancien élève prématurément décédé, je ne sais pas).